jeudi 19 juillet 2007

I am what I am*

Je me prends de petites claques. Des bouffées de souvenirs complètement enfouis. De petits moment anodins qui ne font rire que moi, en silence. Les uns n'ont rien à voir avec les autres, et forment des jours assez tranquilles. L'angoisse est endormie momentanément. Le temps n'est pas à l'introspection pure, mais à la confrontation : le moi d'aujourd'hui et celui d'hier, moi vu par moi, et — je ne m'étais pas rendu compte que cela faisait si longtemps que je n'avais pas pris cette dimension en compte de cette manière là — moi vu par les autres.

Comment un enfant qui passait des heures à tourner en rond (oui, façon derviche) dans une robe dénichée au fins fonds des placards de sa mère peut-il devenir un grand gars mi-ours mi-peuplier sans avoir l'impression de s'être trahit en chemin ? Comment le même peut-il donner l'impression d'être le mâle sur de lui, qui va vers les autres en toutes circonstances sans douter ?

Moi aussi, BB, j'ai passé des heures à rêver à la magie qui était en moi en secret. C'est la petite fille aperçue, marchant derrière son père, le suivant à peine consciemment qui me l'a remémoré réellement. J'ai souvent des bouffées de tendresse (et sans doute de nostalgie), à l'égard des enfants rêveurs, ou qui ouvrent sur le monde des yeux plein d'interrogations.

La fillette, bâton à la main, façon canne d'aveugle... qui s'arrête soudain précisément à l'angle de la rue : elle frappe le sol du bout du bâton, l'air décidé. Aucun doute que la magie avait fonctionné vu son air ravi. À peine une légère moue de dépit ensuite.

Quand ai-je cessé ces rêveries ? Perdu cette conviction que la magie était en moi ? Qu'est-ce qui l'a tuée ? L'adolescence ? La fin de la rêverie au bénéfice de la morosité ? La conviction d'être adulte, dans le monde ?

Est-ce que le fait d'être capable d'imaginer, en plusieurs session dans la journée, voire dans la semaine, des paragraphes entiers que j'aimerais écrire ici, en plus de quelques scénarios cochons très personnels, ce n'est pas perpétuer cette aptitude à rêver le monde, en arrivant rarement à concrétiser ? (J'ai fait l'effort de retranscrire ces phrases informes, sans réel enchaînement logique, pour une fois.)

La magie, perpétuée dans le monde adulte, est-ce que ce n'est pas être le magicien des autres ? Savoir ce dont on rêve soi-même et l'organiser pour les autres, comme un parent ment à ses enfants pour le plaisir de voir s'illuminer les yeux devant un sapin de noël garni de cadeaux. Sans forcément attendre la réciproque, en en ayant fait le deuil, parce que la naïveté qui permet de vivre tout cela pleinement est envolée. Que passer des jours à trop désirer une chose, un événement, laisse souvent un accomplissement décevant, alors que les grands plaisirs viennent imprévus.


Quelques occasions sociales de me remettre en perspective. Qui se cumulent avec des discussions rassérénantes sur msn : abandonner la posture complexée, donner le bon en moi, faire taire ou contourner le mauvais.


Et puis des petits bonheurs : un café en terrasse imprévu, le passage d'un copain pas vu depuis longtemps, et le temps nécessaire disponible, pour une fois. Et un de mes matages favoris qui prend une table juste à côté. Un ouvrier du bâtiment, sans doute. Immense gaillard, façon viking. Le crâne tondu, la peau tannée, des yeux bleus à tomber dedans. Perdu seul, attendant que la serveuse daigne s'intéresser à lui. Ne comprenant absolument pas pourquoi mon regard s'attardait si souvent sur lui. Reprenant confiance au retour de son collègue parti acheter un coffret de parfum pour sa douce. Et l'autre lui demandant s'il connaissait le parfum, mon immense gaillard de se saisir délicatement du flacon, et de le tester sur son poignet en connaisseur.

... J'ai beaucoup rit intérieurement, mais j'adore ce contraste du mec sans raffinement mais à qui on a appris a ne pas casser ce qu'il manipule... s'il fait l'amour avec cette délicatesse, j'achète ! (euh, s'il est très brute aussi)


Et encore : je m'étendrai forcément un jour sur ce chapitre. L'été changeant les horaires de tout le monde, ma salle est fréquentée différemment. Je croise d'autant plus de ces petits gars insupportables pour moi, cons comme des balais, avec plus ou moins de sensibilité, qui prennent des muscles en quelques mois sans trop suer... qui vous rejoignent sous la douche sans aucune arrière-pensée, pour raconter qu'ils ont un pote qui est super sportif mais qui n'irait jamais dans un club dont les douches sont collectives. Et tout en vous matant de haut en bas pendant que vous ne pouvez pas arrêter de les regarder, vous assurent que "je lui ai pourtant dit, sous la douche, on se regarde même pas". J'ai failli dire plein de conneries ("il en a une très petite, pas comme toi mon mignon", entres autres, ou encore "moi je ne peux pas ne pas mater, c'est plus fort que moi"). Mon pote présent dans le vestiaire a attendu exprès sans nous rejoindre, me laissant me démerder, mais thanks god, ne faisant pas dans la surenchère, pour une fois.

Passage obligé au retour par le bois... J'avais promis que j'arrêterais. Désolé Jean, mais il n'y a pas encore suffisamment de conviction de finalité pour que j'arrive à tenir ce genre de résolution.

*and who I am, oeuf corse !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

S'il est brute... j'achète aussi. :)